CHRISTINE PIOT
   Depuis une quinzaine d’années, Christine Piot réalise des peintures sur toiles à la tempera, qu’elle a choisi de nommer « Clairs-allants ». Cette dénomination générique est accompagnée d’un sous-titre plus précis, comme « follet » (2007) ou « la déferlante » (2013).
   Au début des années 2000 les formes des « Clairs-allants » étaient caractérisées par une certaine simplicité, montrant de légers traits clairs sur fond sombre. Puis celles-ci ont évolué vers une complexification, une vaporisation des formes, et des couleurs plus claires.
   Ces deux mots de « Clair-allants » nous entraînent dans un monde onirique plus ou moins évocateur, que le regardeur peut interpréter à sa guise. Dans les tableaux de 2014 et 2015, une atmosphère dansante suscite une sorte de joie devant des cieux cléments, où les nuages ne font que passer. Christine Piot vit en grande partie à la campagne et son rapport à la nature est très prégnant. Les virtualités de la nature s’imposent sans doute à elle, quoique semi-inconscientes. Le surgissement des formes peut s’élancer vers un grand plan horizontal dans des tons beiges, que l’on ressent comme un éblouissement métaphysique. Les dernières peintures peuvent évoquer des liens avec un déroulement de tissus moelleux et doux, ce qui corrobore l’apport de la bienfaisance de la nature. Elles peuvent suggérer des îles, l’écume des vagues ou des jeux de lumière s’engloutissant dans un nuage plus sombre.
Mais la peinture de Christine Piot reste abstraite, orientée vers une gestualité lyrique, où dit-elle « le geste et la couleur tissent de l’indéfinissable ». Le réel reste insaisissable, d’où l’ambivalence de sa recherche. Ce qui me fait penser à ce qu’écrivait Abdelwahab Meddeb à propos de l’harmonie de l’univers : « Comme si l’harmonie cosmique, engendrée par la naissance des formes, restait empreinte du chaos d’où elle provient. »(1)
Anne Dagbert, mars 2015
(1) in la revue art absolument, no 56, novembre-décembre 2013.